Le compte-rendu de l'entretien entre Michaël et Jésus

 

Comment s'est passée cette longue conversation avec Jésus au fil de l'évangile de Marc ? Ce fut un moment très amical, quelque chose de très humain et de très divin à la fois (pourquoi d’ailleurs opposer l’un à l’autre ?). Jésus a tenu à me mettre à l’aise dès le début, m’invitant à faire de temps à autre un « break » pour prendre un café, boire un coup d’eau ou manger un bout. Même s’il me laissait l’interrompre fréquemment pour lui poser des questions, il gardait la conduite de l’entretien car il était important que nous puissions parcourir l’ensemble des 16 chapitres de Marc.

Et sa voix, me direz-vous ? Comment était sa voix ? Elle était claire et chaleureuse, sans affectation : il parlait tout simplement. Parfois il faisait une pause, comme s’il réfléchissait, comme s’il cherchait le mot juste. A certains moments, je le sentais s’animer davantage, comme s’il revivait une scène de l’évangile avec les mêmes sentiments de joie, d’émerveillement ou de tristesse, de colère ou de frustration. Mais à aucun moment je n’ai eu l’impression qu’il me prenait de haut. C’était plutôt le ton de la confidence, « comme un homme parle à son ami » . Sans langue de bois, sans « langue de buis » devrais-je plutôt dire.

Au début, j’étais un peu dérouté, car sa version de Marc ne ressemblait à aucune de celles que je connaissais : il m’a donc expliqué qu’il lisait cet évangile dans le texte grec – qui lui était plus familier, puisque c’était une des langues parlées à son époque - et qu’il le traduisait au fur et à mesure pour moi, en adoptant les expressions du langage parlé. Les autres versions reproduisent le passé simple du texte originel, soulignant le caractère « historique » de ce qui s’est passé « en ce temps-là ». Sauf que ce temps-là, pour nous, est à 2.000 ans de distance ! En écoutant Jésus, ce jour-ci, j’avais vraiment l’impression que les événements se déroulaient sous nos yeux et que cette bonne nouvelle devenait vraiment pour moi un « Aujourd’hui » !

* * *

Je veux vous confier à présent ces précieuses notes. Jésus n’a pas voulu que je l’enregistre avec un dictaphone ni que je retranscrive ses paroles sous la dictée. Comme il y a deux mille ans, il prend à nouveau le risque de confier sa Parole à un être humain, qui la reformulera dans sa propre langue, avec ses propres mots, sa propre culture et sa propre expérience, lesquels lui feront privilégier certains éléments et sans doute en minimiser, voire en oublier d’autres.

Il n’y a pas d’Evangile à l’état pur. Celui de Matthieu n’est pas celui de Marc, comme celui de Jean diffère radicalement de celui de Luc autant que des deux autres. Parfois, ils racontent les mêmes événements et les mêmes paroles de Jésus, mais en accentuant tel ou tel aspect auquel ils sont plus sensibles, parfois on a l’impression qu’ils se contredisent. Les exégètes modernes nous disent que leurs écrits reflètent la foi et les préoccupations de la communauté chrétienne dans laquelle ils vivaient et à laquelle ils s’adressaient.

Ce livre n’échappe pas à la règle. Comme dit si bien le proverbe italien "Traduttore, traditore", le traducteur d’un texte - et a fortiori celui qui cherche à mettre en mots une expérience spirituelle, mystique - est forcément un « traître » … mais c’est le prix à payer pour que ce qui s’est passé il y a vingt siècles en Palestine et qui a complètement transformé ceux qui l’ont vécu, et tout l’empire romain à leur suite, pour que cet événement inouï puisse encore nous toucher aujourd’hui avec la même force, pour que ces paroles soient (à nouveau ?) audibles aux oreilles des gens du 21e siècle et qu’elles puissent produire leur effet spécifique, à savoir : les « retourner », leur faire « changer de regard ».

Après tout, Jésus n’a-t-il pas eu « besoin » du traître Judas pour pouvoir, en vivant sa Passion, nous dévoiler la profondeur de son Amour désarmé ? Je prendrai donc le risque de Le « trahir » (pas volontairement, bien sûr) pour qu’il en soit de même aujourd’hui, pour tous ceux qui voudront me lire.

 

Michaël

 

Créez votre propre site internet avec Webador